Kung Fury – Critique du court métrage de David Sandberg
3 juin 2015 0 Par Louis-Philippe Coutu-Nadeau 3 juin, 2015 @ 22:13:16 PMHommage survitaminé aux films, aux téléséries, aux jeux vidéos et aux publicités des années 80, Kung Fury joue à fond la carte du kitsch et du second degré. Son intertextualité consciente (et inconsciente…) permet de recenser des tonnes de références qui, évoluant côte à côte, ne laissent aucun temps mort et personne indifférent!

David Sandberg est un réalisateur suédois de 29 ans qui vient de sortir de l’anonymat après plusieurs vidéos publicitaires à son actif. Pour son premier film, Kung Fury, il porte quatre chapeaux : réalisateur, scénariste, producteur exécutif et acteur principal. Cet enfant génial de la génération Y (la première net generation), ressemblant à s’y méprendre à Johnny Depp dans son jeune temps, a non seulement trouvé son public, mais il a été en mesure de combler des attentes incommensurables.
Voici le synopsis de Kung Fury :
- Détective du Miami Police Department, Kung Fury (David Sandberg) est devenu un expert en arts martiaux après avoir été frappé par la foudre et mordu par un cobra. Il entreprend un voyage dans le temps depuis l’année 1985 jusqu’à la Seconde Guerre mondiale grâce à Hackerman (Leopold Nilsson). Son objectif : tuer le pire criminel de tous les temps en la personne d’Adolf Hitler (Jorma Taccone), alias « Kung Führer ». Un problème technique va le propulser jusqu’à l’ère Viking où Thor (le bodybuilder sexagénaire Andreas Cahling) va lui donner un coup de… marteau pour atteindre la bonne époque.
Difficile de résumer une telle histoire, même dans ses grandes lignes! Avant d’entrer dans le vif du sujet, il est important de savoir comment tout a commencé.
IL ÉTAIT UNE FOIS
Cette aventure rock-ambolesque a commencé le 26 décembre 2013 lorsque Sandberg a mis en ligne une bande-annonce qu’il a lui-même financé au coût de 5 000 dollars. Cinq à six mois de tournage ont été nécessaires pour réaliser cette vidéo (11 521 024 visionnements au moment d’écrire ces lignes) qui lui a permis de lancer un projet sur la plateforme de financement participatif américaine Kickstarter.
https://www.kickstarter.com/projects/kungfury/kung-fury
Avant le 25 janvier 2014, son but était de récolter 200 000 dollars pour faire un court-métrage ou un million de dollars pour faire un long-métrage. Grâce à la générosité de 17 713 internautes, il a obtenu la somme de 630 019 dollars et s’est donc dévoué corps et âme dans une version d’une demi-heure.
Le 16 avril 2015, l’acteur David Hasselhoff (les téléséries Knight Rider et Baywatch) a publié sur sa chaîne YouTube le vidéoclip de la chanson-thème du film, True Survivor, dans lequel il prête sa voix aux paroles. La vidéo présentait aussi des extraits exclusifs du film à venir. 13 199 457 personnes l’ont visionné jusqu’à maintenant.
Le 28 mai 2015, le film a été lancé gratuitement sur YouTube. Il a été regardé par quatre millions de personnes dans les premières 24 heures et était rendu à 12 151 416 visionnements au moment d’écrire ces lignes, soit après une semaine. Mieux, le 14 août 2018, au moment d’une mise à jour de la critique, le nombre de visionnements étaient de 30 839 734!
DANS LES COULISSES DU FILM
Filmées avec une Canon EOS 5D et une Sony FS700, les images du film ont été volontairement abimées pour obtenir les couleurs baveuses d’une cassette VHS et les soubresauts de la bande magnétique en mode lecture. Ainsi, nous pouvons (re)faire l’expérience d’un visionnement sur magnétoscope!
Les images ci-dessous illustrent bien le travail de moine qui a été effectué dans… le garage de la grand-mère du réalisateur à Umeå, en Suède!

L’INTERTEXTUALITÉ (IN)CONSCIENTE DU FILM
Que ce soit dans sa facture visuelle ou sonore, l’univers de Kung Fury multiplie les clins d’œil à tout ce qui a bercé l’enfance/adolescence de son créateur : Back to the Future, Miami Vice, TRON, The Running Man, Thor, Predator, Terminator, Jurassic Park, The Goonies, The Warriors, Teenage Mutant Ninja Turtles, Ghostbusters, Blade Runner, Timecop, Conan the Barbarian, MacGyver, The Matrix, Street Fighter, Double Dragon, j’en passe et des meilleurs!
À l’image de Quentin Tarantino qui a recours à l’animation dans le troisième chapitre de Kill Bill: Vol. 1 en 2003, Sandberg a retenu les services d’Old Skull Games pour une séquence animée où Kung Fury va au paradis (durée de 23min40 à 24min48). Elle rend hommage à la fois aux séries d’animation G.I. Joe et Dragon Ball Z, sans oublier que le cobra qui sert d’animal spirituel à Kung Fury ressemble à la transformation de Jafar dans Aladdin!
Voici mon top 3 des séquences qui ont particulièrement retenu mon attention :
3. SÉQUENCE-HOMMAGE À 2001: A SPACE ODYSSEY (de 27min17 à 27min46)
Hasselhoff fait également un caméo dans le film sous la forme de HOFF 9000. Il s’agit d’une référence au superordinateur du film de Stanley Kubrick. Dans 2001: A Space Odyssey, HAL 9000 refuse d’ouvrir la porte du vaisseau à Dave Bowman qui est prisonnier d’une capsule de sortie. Dans Kung Fury, HOFF 9000 refuse obstinément d’ouvrir la porte de la Lamborghini pour en laisser sortir le protagoniste. HOFF rappelle aussi KITT, l’ordinateur de la voiture que conduisait Hasselhoff dans Knight Rider…
2. SÉQUENCE-HOMMAGE À GRÄNSEN (de 16min22 à 17min31)
Gränsen est le titre original d’un film suédois traduit en français par Opération Arctic Fox. Sorti en 2011, il s’agit d’un des seuls films de ce pays à traiter de la Seconde Guerre mondiale. Kung Fury parodie ce film dans l’une de ses scènes où deux tankistes allemands s’obstinent à savoir lequel porte une vraie moustache aryenne. Hilarant!
1. SÉQUENCE-HOMMAGE À MORTAL KOMBAT (de 18min30 à 20min08)
À grand renfort d’écrans verts, ce moment d’anthologie reprend le défilement parallaxe de Mortal Kombat au cours duquel Kung Fury se déplace de droite à gauche en mettant KO tous les sbires d’Adolf Hitler sur son passage. Il termine même son élan avec le Fatality que Sub-Zero exécutait dans le premier jeu de 1992!
AU-DELÀ DU FILM
KUNG FURY: STREET RAGE
Oui, un jeu vidéo basé sur Kung Fury est déjà disponible sur mobile. C’est Laser Unicorns, la société de production derrière le film, qui a demandé à un développeur de le concevoir. Ce beat them all classique, avec ses graphiques simplistes dans le pur esprit des consoles 8 et 16 bits du siècle dernier, est téléchargeable sur l’un des liens suivants :
APP STORE : http://apple.co/1ESIezv
GOOGLE PLAY : http://bit.ly/1FYoK3n
STEAM : http://bit.ly/1ciHyMM
WINSTORE : http://bit.ly/1PZJHQk
LES PRODUITS DÉRIVÉS
La vague déferlante ne s’arrête pas là. Il est possible de commander le poster officiel s’inspirant de la saga Star Wars, des tee-shirts au look vintage et même la soundtrack du film en version vinyle! Pour ce faire, visitez la boutique en ligne sur le site officiel de Kung Fury :
MA CRITIQUE DU FILM
En ce qui me concerne, je n’avais pas la moindre idée de ce qui m’attendait en cliquant sur un statut de mon fil de nouvelles Facebook. Moi qui ne suis pas réfractaire à un mauvais goût assumé, dans la mesure où il participe à créer un univers fictif cohérent, j’ai donc été agréablement surpris!
Le Power Glove du NES, le M134 Minigun de Predator et Terminator 2: Judgment Day, la musique électronique d’un synthétiseur qui reprend les codes de l’Outrun (sous-genre de musique électronique), le logo de Laser Unicorns qui s’inspire de celui de Mortal Kombat, les clins d’œil à Bruce Lee : bref, ce ne sont là que quelques exemples de détails qui ont agrippé le collet du cinéphile en moi qui carburait à la même essence que Sandberg!
Un ami m’a fait remarquer les similitudes du film avec la bande-annonce du jeu vidéo Far Cry 3: Blood Dragon qui est sorti en 2013. La preuve que le réalisateur de Kung Fury n’est pas le seul à s’inspirer des années 80!
Pourquoi Adolf Hitler? La raison est fort simple et Sandberg l’explique comme suit :
« Kung Fury est le meilleur policier du monde. Il fallait donc qu’il se batte contre le pire criminel de l’histoire. Quand j’ai pensé à un mauvais garçon, la première chose qui m’est venue à l’esprit, c’est Hitler. »
Du début (les trois skateboarders qui catapultent la voiture de police dans les airs) jusqu’à la phrase post-générique (No dinosaurs were extinct in the making of this movie), Kung Fury ne s’essouffle jamais. Je considère même que se lancer sur la piste des références cachées (les easter eggs sont à la mode!) favorise un enrichissement culturel. Grâce à sa récolte sur Kickstarter et sa gratuité sur YouTube, la pérennité de son succès est assurée, et son statut de film culte à l’avenant!
Visitez la page facebook du film pour plus d’informations :
https://www.facebook.com/KungFuryOfficial

« J’ai le projet de faire une version longue de Kung Fury et quelques autres idées mais c’est un peu tôt pour en parler. Mon seul rêve, c’est de pouvoir faire des films le reste de ma vie. Ce projet m’a permis d’ouvrir beaucoup de portes, j’espère en ouvrir d’autres. »
En attendant le long métrage qui comptera dans sa distribution Arnold Schwarzenegger et Michael Fassbender, ce chef-d’œuvre inspiré et inspirant est à (re)voir en compagnie de d’autres nostalgiques des eighties ou sous l’influence de psychotropes, bien que le réalisateur affirme n’avoir rien consommé durant son processus de création.
Avec une voix badass, je n’ai que deux mots à dire à David Sandberg, son équipe et les 17 713 contributeurs de Kickstarter : Tank you!
Verdict : 9 sur 10
Véritable cinéphile, Louis-Philippe Coutu-Nadeau est un scénariste-réalisateur-monteur qui a une cinquantaine de contrats à son actif en tant que vidéaste (mariages, captations d’événement, publicités, vidéoclips). Il s’occupe d’ailleurs de toutes les vidéos du concessionnaire Alix Toyota depuis juin 2013. Il a aussi été pigiste pour trois boîtes de production, soit le Studio Sonogram, VLTV Productions et Ikebana Productions. Sa filmographie personnelle présente pas moins d’une vingtaine de titres dont le film Khaos et la websérie Rendez-vous. Il possède un baccalauréat en études cinématographiques à l’UdeM et un baccalauréat par cumul de certificats à l’UQÀM (en scénarisation cinématographique, en création littéraire et en français écrit). Vous pouvez visionner son expérience contractuelle et son expérience personnelle sur son site officiel : www.lpcn.ca
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À propos de l’auteur
Véritable cinéphile, Louis-Philippe Coutu-Nadeau est un scénariste-réalisateur-monteur qui a une cinquantaine de contrats à son actif en tant que vidéaste (mariages, captations d'événement, publicités, vidéoclips). Il s'occupe d'ailleurs de toutes les vidéos du concessionnaire Alix Toyota depuis juin 2013. Il a aussi été pigiste pour trois boîtes de production, soit le Studio Sonogram, VLTV Productions et Ikebana Productions. Sa filmographie personnelle présente pas moins d'une vingtaine de titres dont le film Khaos et la websérie Rendez-vous. Il possède un baccalauréat en études cinématographiques à l'UdeM et un baccalauréat par cumul de certificats à l'UQÀM (en scénarisation cinématographique, en création littéraire et en français écrit). Vous pouvez visionner son expérience contractuelle et son expérience personnelle sur son site officiel : www.lpcn.ca