Versailles : Simon Mirren et David Wolstencroft dévoilent leur vision de la série

Versailles : Simon Mirren et David Wolstencroft dévoilent leur vision de la série

17 novembre 2015 0 Par Jean Francois Cloutier 17 novembre, 2015 @ 21:49:14

Simon Mirren et David Wolstencroft, les deux créateurs et showrunners de Versailles nous dévoile leur vision de la série.

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Comment deux auteurs britanniques peuvent-ils en venir à écrire une série sur un roi de France ? La réponse tient en un mot : Apple. Le monde entier a assisté à la transformation d’Apple en une marque planétaire par Steve Jobs. Peu de gens, en revanche, savent que sans Louis XIV et Versailles, rien de notre monde actuel n’existerait en l’état. Versailles fut en son temps ce qu’Apple est devenu : une marque internationale. La toute première de l’Histoire.

Tout bon récit comporte une part d’universel. Et nous pensons que peu d’histoires sont aussi exaltantes ou aussi intemporelles et pertinentes que celle de Versailles. Le château de Versailles et le règne du Roi-Soleil sont à l’évidence deux grands piliers de l’histoire de France. Et – avouons-le – ce n’est pas sans une certaine appréhension que nous nous sommes engagés dans ce projet, conscients que les Français pourraient ne pas apprécier de voir leur patrimoine historique réinterprété par des Anglo-Saxons.

Nous avons alors adopté une démarche qui porte presque toujours ses fruits : prendre un peu de recul et contextualiser les choses. C’est ainsi que nous nous sommes souvenus que Louis était le petit-fils d’une Médicis. Qu’il avait épousé Marie-Thérèse, une Espagnole. Et que sa belle-soeur, Henriette, était princesse d’Angleterre. Et soudain, tout est devenu clair. L’histoire de Versailles n’est pas seulement française. Pas même seulement européenne. C’est une histoire universelle.

Les toutes premières histoires que la plupart d’entre nous ont entendu raconter comportaient sans doute un roi vivant dans un château au milieu d’une forêt. Versailles est donc pour nous une histoire qui, tout en étant profondément ancrée dans le patrimoine français, n’en est pas moins universelle en ce qu’elle a trait à la soif de puissance et de contrôle.

L’histoire de ce jeune monarque centralisant son pouvoir se double ainsi de celle d’un jeune homme cherchant à surmonter ses propres démons et à prendre le contrôle de sa vie, d’une façon ou d’une autre. Nous nous sommes dit qu’il serait captivant de le voir se mesurer à ces forces et remporter la bataille. N’y a-t-il pas un bâtisseur en chacun de nous ?

Si l’on s’en tient aux livres d’histoire, on pourrait facilement croire que Louis XIV commença à exercer son pouvoir absolu dès son accession au trône et pour tout le reste de son règne, et qu’il aurait pu s’en prévaloir comme d’un droit héréditaire, gravé dans le marbre des chroniques royales. Rien n’est moins vrai, selon nous. La grande transformation de Louis XIV, un simple héritier devenu “P-DG”, nous invite à une plongée fascinante dans ce que les psychologues appelleraient “la volonté de puissance”. Le projet d’une vie, reposant tout entier sur la force de volonté d’un individu et qui, toujours, fut à deux doigts d’échouer.

Un an après la mort de sa mère, femme aimée quoique tyrannique, Louis est encore un jeune homme tourmenté par son manque d’assurance et de stabilité dans une époque houleuse et troublée. Impossible de dire où le mènera sa destinée. Il n’appartient qu’à lui de l’arracher des mains de ses ministres qui, tout au long de sa régence, n’ont cessé de le manipuler.

Versailles canal+

Notre première saison est donc consacrée au passage de l’enfance à l’âge adulte et à l’émancipation du jeune souverain. En tant qu’auteurs, nous travaillons depuis de longues années sur des séries peuplées de criminels psychopathes et autres personnes atteintes de troubles de la personnalité. Nous avons donc toujours considéré l’architecture de cette série comme inextricablement liée à la structure même de l’esprit de Louis XIV, jeune homme plein d’ambition, mais aussi de traumatismes, paranoïaque, sociopathe borderline et même, à certains moments, psychopathe.

Le château de Versailles forme, à plus d’un titre, une carte de l’esprit du monarque. Y instaurer le centre du pouvoir et tourner ainsi le dos au passé et à Paris fut un coup de génie dans l’art de la realpolitik. Une mesure tout aussi innovante, géniale, moderne et provocante que Louis XIV lui-même. Car Louis ne se contenta pas de faire bâtir un palais à Versailles : il posa les bases de la culture, de la mode, de la gastronomie… mais aussi de la police secrète.

Le roi n’est pas le seul à avoir retenu notre attention. Son frère Philippe, duc d’Orléans, dit “Monsieur”, nous a fait l’impression d’un personnage hors du commun, extraordinairement moderne. Il nous a littéralement conquis. C’est bien simple : jamais nous n’avions rencontré un tel personnage, guerrier ouvertement gay, patron des arts, prescripteur des goûts et de la mode, esclave soumis à son mignon, le très manipulateur Chevalier de Lorraine, et homme qui toujours vécut dans l’ombre de son aîné. L’hostilité de Louis envers son frère est une clé essentielle de notre scénario.

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Monsieur est un personnage tout en contradictions, entre passivité consentie, colère rentrée et, tout comme son frère, disposant d’un solide appétit charnel. Entre ces deux hommes, une femme : Henriette d’Angleterre, soeur du roi Charles II, étrangère à la cour, femme parmi les plus belles de son temps, épouse de Monsieur et (dans notre scénario) maîtresse de Louis XIV… Un triangle que nous aurions aimé creuser sur cent épisodes ! Furieux de voir son frère courtiser sa propre femme, Philippe n’en continue pas moins de fréquenter le Chevalier de Lorraine, et cherche à asseoir son emprise sur Henriette en lui infligeant grossesses répétées et divers mauvais traitements, tant psychologiques que sexuels.

L’Histoire, on le sait, est toujours écrite par les vainqueurs. La majorité des sources qui nous sont parvenues relèvent donc plus ou moins de la manipulation. Nous disposons de documents, certes, mais savons-nous au juste de quelles motivations ils résultèrent et quels intérêts ils étaient censés servir ? Nous ne connaissons de l’histoire que la partie émergée de l’iceberg. En écrivant VERSAILLES, nous avons cherché à plonger sous l’eau pour découvrir le reste. Quant aux diverses intrigues, elles ne font que commencer…

Simon Mirren et David Wolstencroft, créateurs de la série

Versailles, le lundi à 20h55 sur Canal+

Source: http://versailles.canalplus.fr/