Terraformars – Critique du film de Takashi Miike

19 juillet 2016 1 Par Louis-Philippe Coutu-Nadeau 19 juillet, 2016 @ 12:51:38

Fantasia existe depuis 20 ans et il a projeté plus de 30 films de Takashi Miike. C’est dire combien ce réalisateur japonais est important pour les organisateurs du festival et les festivaliers. Tout a commencé en 1997 avec Fudoh: The New Generation, le premier titre de sa filmographie à toucher terre en Amérique du Nord. Mieux, cette année, Miike est venu en personne présenter son dernier-né, Terraformars.

Pourquoi a-t-il mis tant de temps à venir nous rendre visite? Tout simplement parce qu’il était trop occupé, enchaînant tournage par-dessus tournage. C’est d’ailleurs durant de ce premier passage à Fantasia, le 16 juillet 2016, qu’il s’est vu remettre le Lifetime Achievement Award pour l’ensemble de son œuvre éclectique, laquelle trouve racine dans plusieurs genres (l’horreur, principalement, mais aussi la comédie musicale avec The Happiness of the Katakuris ou le film pour enfants avec Zebraman), voire parfois plus d’un dans un même projet.

Terraformars

Vous aimez le cinéma fantastique, en particulier la science-fiction? Vous avez aimé les Arachnides de Starship Troopers, les décors cyberpunk de Blade Runner, le costume des Stormtroopers dans Star Wars et, tant qu’à y être, les animalités de Mortal Kombat: Annihilation? Terraformars est assurément pour vous!

Nous sommes en 2599 et la Terre fait face à un problème critique de surpopulation. Le gouvernement décide alors de coloniser Mars qui, depuis 500 ans, est en pleine terraformation grâce à de la mousse et des coquerelles envoyées à sa surface. La mission Bug-2 tentera de faire oublier l’échec de Bug-1 et s’y rend avec un équipage composé de criminels, dont Shokichi Komachi et sa sœur Nanao Akita (Hideaki Itô et Emi Takei), tous deux accusés de meurtre. En échange d’une liberté et d’argent promis à leur retour, l’équipage accepte quelques modifications génétiques leur donnant les caractéristiques de différents insectes. La survie est-elle possible sur cette planète dont la couleur rouge n’évoque non plus la surabondance d’oxyde de fer, mais bien le sang?

Il y a un lien de parenté entre Terraformars et Starship Troopers.

Pour Terraformars, l’imagination du réalisateur n’a eu d’égale que les possibilités infinies que lui offrait le numérique, une technique qu’il voulait approfondir, surtout pour des coquerelles humanoïdes géantes. Il s’est toutefois basé sur la manga éponyme scénarisée par Yû Sasuga et dessinée par Kenichi Tachibana, laquelle comprend 15 volumes publiés depuis janvier 2011. Avant l’adaptation cinématographique en live, il avait fait l’objet de deux adaptations télévisuelles en dessins animés de 13 épisodes, l’une en 2014 et l’autre en 2016.

À noter que Miike a déjà porté à l’écran les mangas MPD Psycho, Crows, Worst, Ichi the Killer, Jeux d’enfants et Mogura no Uta.

Le casting est excellent, à commencer par Hideaki Itô (Sukiyaki Western Django, The Princess Blade) et Emi Takei (Rurouni Kenshin: Kyoto Inferno, Love for Beginners) en Shokichi et Nanao. Ce dernier m’a par moments rappelé Toshiro Mifune, l’acteur fétiche du grand Akira Kurosawa. Quant à Shun Oguri (Crows Zero I & II), il sort du lot dans le rôle de Ko Honda, le méchant de service efféminé qui s’habille en robe à imprimé fleuri, une tête pensante qui a « presque » tout planifié.

Il y a un lien de parenté entre Terraformars et Blade Runner.

Certains diront qu’il était inutile d’approfondir, sous forme de flashbacks, des personnages qui ne survivront pas jusqu’au générique de fin. D’autres, comme moi, vous expliqueront que de mettre tous les personnages (principaux et secondaires) sur un même pied d’égalité, avec un passé développé et personnalisé, rend les rebondissements encore plus inattendus. Impossible donc de savoir qui survivra tellement rien n’est prévisible.

De mauvaises langues reprochent souvent à Miike de tourner en dérision ses personnages féminins. Je crois que cette misogynie n’est que façade, en ce sens que les femmes dans ce film-ci du moins sont toujours au centre des rebondissements susmentionnés.

Il y a un certain travail de recherche derrière les transformations génétiques des membres de Bug-2. Chacune d’entre elles est présentée et expliquée à l’écran, une parenthèse qui rend l’histoire encore plus vraisemblable pour les spectateurs et fait en sorte que le résulte se rapproche d’un jeu vidéo. Les entomologues aguerris y trouveront peut-être nombre d’incohérences, tant dans les termes employés que dans les statistiques, mais Miike n’a rien d’un documentariste si je ne m’abuse…

Il y a un lien de parenté entre Terraformars et Star Wars.

Miike est extrêmement prolifique. Que ce soit pour le cinéma ou la télévision, il a été crédité en tant que réalisateur dans près d’une centaine de productions en un quart de siècle!

L’homme de 55 ans a confié ceci à l’endroit des spectateurs de Fantasia qui n’ont pas peur des coquerelles : « Je recommande à tous les Nord-Américains d’aller au Japon dans les endroits où il y a beaucoup de coquerelles pour ressentir le sentiment de la peur. »

Bref, Terraformars m’a agréablement surpris au point de piquer ma curiosité sur le cinéma japonais inspiré de mangas. C’était le premier film que je visionnais de Miike et j’ai même eu la chance de le voir en personne. Autrement dit, et c’est triste à admettre en tant que cinéphile, je n’ai vu à peine qu’un pour cent de sa filmographie. J’ai l’intention de m’y mettre, incessamment, en commençant par Audition, Ichi the Killer, 13 Assassins, As the Gods Will et la trilogie Dead or Alive. Quant à vous, connaisseur de ce cinéaste workaholique ou non, découvrez son plus récent film avant qu’il en termine un autre!

Verdict : 8 sur 10