Laplace’s Witch – Critique du film de Takashi Miike

20 juillet 2018 0 Par Louis-Philippe Coutu-Nadeau 20 juillet, 2018 @ 0:54:42 AM

Qui dit nouvelle entreprise cinématographique de Takashi Miike dit expérience cinéphilique inattendue. Chaque projet du réalisateur stakhanoviste de 57 ans est, comble de l’ironie, attendu de pied ferme par les festivaliers à quasiment toutes les éditions annuelles de Fantasia depuis que Fudoh: The New Generation (Gokudô sengokushi: Fudô en VO) a été présenté en 1997. Hier, soit plus de deux décennies plus tard, j’ai évidemment répondu présent à la projection de Laplace’s Witch (Rapurasu no Majo en VO) sans trop réfléchir, d’autant plus qu’il s’agit à la fois du 102e titre de sa filmographie hétéroclite et d’une première nord-américaine.

Laplace's Witch

Laplace’s Witch

Voici le synopsis tel que Fantasia le propose dans son programme, synopsis composé par Matthew Kiernan et traduit de l’anglais par Kevin Laforest :

Quelque part au Japon, un corps est découvert près d’une source chaude, dans un pittoresque décor hivernal. Puis un autre cadavre est trouvé, au même endroit. Les deux victimes sont mortes assez inhabituellement, d’un empoisonnement à l’hydrogène sulfuré, alors la police consulte le professeur de géochimie Shusuke Aoe (Sho Sakurai) afin de voir s’il pourrait s’agir de meurtres. Puisqu’une telle chose serait possible seulement si le tueur avait des connaissances précises à propos des conditions géologiques des environs, c’est une notion peu plausible, jusqu’à ce qu’Aoe rencontre Madoka Uhara (Suzu Hirose), qui s’avère posséder de telles connaissances. Cela mène le professeur et la police dans une direction inattendue, dans un monde où le surnaturel, le mystique et notre réalité se croisent, et dans un combat entre la vie, la mort et l’au-delà.

L’histoire adapte le roman éponyme de Keigo Higashino datant de 2015. Quant au titre, il renvoie évidemment au mathématicien français Pierre-Simon Laplace (1749-1827) qui, dans Essai philosophique sur les probabilités publié en 1814, donne son interprétation du déterminisme. Il y décrit une intelligence suprême (qui sera appelée démon avec le temps) capable de calculer et de prédire tous les événements à venir. Cet apport théorique est au cœur de l’intrigue, concernant les personnages de Madoka et Kento respectivement campés par Suzu Hirose (Chihayafuru Part I & 2) et Sota Fukushi (Bleach, Blade of the Immortal, As the Gods Will).

Le problème majeur du film, mis à part sa drôle de fin qui s’étire en longueur, réside dans le fait que les scènes s’enchaînent sans que de vraies pistes ou fausses pistes orientent notre volonté à résoudre l’enquête en cours. C’est pourtant une nécessité incontournable dans un polar afin que le spectateur s’implique activement. De plus, les nombreux retours en arrière brisent le rythme que les scènes se déroulant au présent tentent de maintenir. Miike aurait-il dû céder Laplace à quelqu’un d’autre?

Shusuke Aoe (Sho Sakurai) et Madoka Uhara (Suzu Hirose) dans Laplace’s Witch.

En trois couvertures consécutives de Fantasia, j’ai vu cinq films de Takashi Miike : Terraformars en 2016, JoJo’s Bizarre Adventure, The Mole Song: Hong Kong Capriccio et Blade of the Immortal en 2017, ainsi que Laplace’s Witch cette année. Bien qu’il ne soit pas un chef-d’œuvre en soi, je ne regrette pas d’avoir vu son dernier-né. J’ai désormais un meilleur aperçu de l’étendue de son talent au point de reconnaître ici qu’il sait alterner entre plusieurs genres cinématographiques comme un ambidextre change de main et que, avec ou sans gants blancs, il reste un… humain!

Verdict : 6,5 sur 10

P.S. : À noter que Laplace’s Witch n’a rien à voir avec Laplace’s Demon proposé l’an dernier à Fantasia.

Sota Fukushi est Kento Amakasu dans Laplace’s Witch.